TECHOZYME
PURIFICATION DES ACIDES NUCLÉIQUES

COMMENT OPTIMISER L’ÉTAPE DE LYSE POUR AMÉLIORER LE RENDEMENT ?
Purification d'acides nucléiques et obtenir un rendement optimal
La purification des acides nucléiques est une étape clé pour les études fonctionnelles en biologie. En raison de la grande diversité des organismes vivants dans la nature, la purification devient un réel défi pour les chercheurs, en particulier la lyse des cellules.

L’évolution des méthodes de lyse a permis de gagner en efficacité, en rapidité et en simplicité. Mais, cette étape de lyse reste une étape cruciale pour le rendement et la qualité de la purification.

Nous consacrons donc ce TechOzyme aux différentes techniques de lyse et ce qu’elles permettent d’améliorer dans la purification des acides nucléiques. 
RAPPEL : LES ÉTAPES DE PURIFICATION DES ACIDES NUCLÉIQUES
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Il y a deux grandes étapes pour la purification des acides nucléiques, la lyse ou l’extraction, et la purification ou l’isolement.
- La lyse est une étape importante qui prépare, à partir d’un échantillon, un lysat ou un homogénat brut. C’est un véritable bouillon contenant les acides nucléiques, les nucléases, les débris cellulaires et d’autres composants.
- L’étape de purification sépare l’ADN ou l’ARN des autres composants du lysat. La séparation doit être spécifique pour éliminer tous les composants du lysat et ne conserver que les acides nucléiques.

L’efficacité de la lyse est déterminante pour le rendement et l’intégrité des acides nucléiques ; celle de la purification assure la pureté.
POINT CRITIQUE DU PROTOCOLE : LA LYSE
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L’étape de lyse impacte directement le rendement et la qualité des acides nucléiques. La lyse doit être suffisamment puissante pour casser les cellules des échantillons (parois, membranes …) et libérer les acides nucléiques.
Il existe plusieurs méthodes de lyse : la lyse mécanique, chimique, enzymatique ou par choc thermique.

1 - Lyse mécanique 
Les échantillons sont broyés mécaniquement soit à l’aide de billes de broyage, utilisées en association avec un broyeur ou un vortex, soit avec un mortier ou pilon. Dans ce cas, l’échantillon est congelé à l’azote liquide. Cette dernière méthode longue et exposée aux risques de la contamination croisée entre les échantillons est de moins en moins utilisée et a laissé place au broyage à billes, une méthode efficace, plus rapide et au débit plus élevé.
Chaque échantillon est broyé avec des billes appropriées dans un tube distinct (stérile et/ou exempte de DNase/RNase) évitant les contaminations croisées. Un équilibre est à trouver entre le type de billes et la puissance de broyage (vitesse et temps) pour que la lyse soit optimale.
Les deux chapitres suivants de ce TechOzyme sont consacrés au broyage à billes et à son optimisation.
2 - Lyse chimique 
Un tampon de lyse qui doit être à la fois efficace pour casser les membranes des cellules et doux pour ne pas dénaturer ou dégrader les acides nucléiques. Pour la purification d’ARN, des sels chaotropiques, du phénol, du guanidine ou du bêta-mercaptoéthanol peuvent être utilisés. Les caractéristiques chimiques d’un échantillon doivent être prises en compte lors de l’optimisation du tampon de lyse. Par exemple, l’acidité d’un échantillon (ex. certains échantillons de sol) peut endommager les ADN et doit donc être neutralisée pour garantir un rendement correct en ADN.

3 - Lyse enzymatique 
La protéinase K est fréquemment utilisée pour la lyse des tissus, des échantillons d’origine laitière (ex. lait, yaourt, fromage …) qui sont riches en protéines. D’autres enzymes sont également utilisées comme les enzymes lytiques (hydrolase, zymolase …) pour digérer la paroi des levures et des champignons.

4 - Lyse par choc thermique 
Les échantillons peuvent être chauffés pour fragiliser les parois des cellules. Cette méthode est souvent utilisée pour les spores et les champignons. Les cycles de congélation/décongélation des échantillons peuvent également provoquer la rupture des membranes cellulaires. Par exemple, le passage de -20°C/- 80°C à 37°C.
FOCUS SUR LE BROYAGE A BILLES
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Les broyages à billes font partie des méthodes de lyse mécanique. Le développement de ces méthodes avec les nouvelles billes et les nouveaux appareils plus puissants permettent de relever les défis de la purification des échantillons résistants aux méthodes traditionnelles de lyse.
La liste de ces échantillons difficiles est longue, citons par exemple les bactéries Gram+, les champignons, les spores, les plantes, les sols (sableux, argileux …), les coraux, les os, les cheveux…
Mais comment choisir les billes et les appareils les mieux adaptés ? Et comment optimiser les conditions de broyage ?

1 - Billes : la matière, la forme et la taille
Les billes utilisées pour le broyage doivent être en matières résistantes. On trouve des formes rondes ou irrégulières. Elles peuvent être petites comme de la poudre ou plus grosses.

La matière et la forme
- Billes en verre : de forme sphérique qui sont adaptées au vortex et tout particulièrement aux broyeurs à haute vitesse, car elles ne s’écrasent pas. 
- Billes en céramique : de forme sphérique, elles sont utilisées pour la purification d’ARN, car la céramique ne s’oxyde pas et ne change pas de couleur en présence des tampons de lyse utilisés pour la purification d’ARN.
- Billes en grenat : de forme irrégulière. Elles sont adaptées aux broyages sur un vortex et il est déconseillé d’utiliser ces billes sur des broyeurs à haute vitesse.
- Billes en métal : de forme sphérique, elles sont à utiliser pour le broyage à sec ou avec des tampons ayant une faible concentration en sels chaotropes.

La taille :
- Petite taille (ex. 0,1 mm, 0,5 mm) : en verre ou en céramique. Ces petites billes sont excellentes pour les micro-organismes, les spores ou les champignons. Elles sont adaptées aussi bien aux vortex qu’aux broyeurs à haute vitesse.
Taille moyenne (ex. 1,4 mm, 2,8 mm) : en céramique ou en métal pour casser les échantillons les plus difficiles ou pour la purification d’ARN. Ces billes sont recommandées avec les broyeurs à haute vitesse, car les vortex n’ont pas la puissance requise.
Les tubes :
Les tubes sont de matière et de taille différente.
On distingue des tubes :
Renforcés : plus résistants et adaptés aux broyages de puissances très élevées (haute vitesse, broyage à sec des échantillons durs …).
Standards : pour des broyages ne nécessitant pas une vitesse très élevée.

2 - Appareils de broyage
Nous conseillons de travailler avec un appareil de broyage à haute vitesse. Le vortex peut être utilisé pour les échantillons moins résistants et/ou pour les billes de forme irrégulière (ex. les billes en grenat).
Vortex :
C’est une approche d’homogénéisation conseillée quand on souhaite conserver l’intégrité des ADN génomiques. Le broyage sur vortex est plus doux car il limite la fragmentation des ADN génomiques. Les billes de formes irrégulières comme le grenat, les billes de petites tailles en verre ou en céramique sont adaptées à ce type de broyage.

Broyeurs à haute vitesse et conditions de broyage :
Les broyeurs à haute vitesse sont conçus pour broyer/homogénéiser/lyser les échantillons en présence de billes. Le temps de broyage est très court (quelques dizaines de secondes).
Ces broyeurs peuvent broyer plusieurs échantillons à la fois, allant jusqu’à 96 échantillons. Certains modèles équipés de modules de refroidissement (ex. le Cryolys®)  pour les broyeurs Precellys®) sont idéaux pour les broyages à froid recommandés pour la purification des ARN. En fonction du modèle de broyeur et du type de billes, une vitesse et un temps de broyage maximum sont à respecter. Les limitations pour les broyeurs Precellys® et les billes de Bertin sont indiquées dans ce tableau.
COMMENT OPTIMISER LES CONDITIONS DE BROYAGE A BILLES ?
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Choix des billes
Nous avons évoqué dans le chapitre précédent les matières et les tailles des billes ainsi que leur utilisation selon les échantillons ou les acides nucléiques à purifier.

Optimisation des conditions de broyage
La vitesse et le temps de broyage doivent permettre une lyse complète de l’échantillon avec un minimum d’effet de fragmentation et/ou de dégradation des acides nucléiques. Les conditions optimales sont à tester pour chaque nouvel échantillon.
Les grosses billes sont plus appropriées pour les broyages tandis que les petites billes sont plus efficaces pour la lyse des échantillons.
Nous conseillons de tester plusieurs types de billes, pour cela consultez le tableau d’aide au choix des billes.

Pour les broyeurs à haute vitesse, les broyages courts et interrompus par des pauses sont à privilégier plutôt qu’un seul broyage long. Par exemple, il vaut mieux faire 2 x 30 secondes de broyage avec une pause de 30 secondes que 1 x 1 minute. En effet, la température s’élève rapidement dans les tubes à cause de la puissance du broyage et augmentent le taux de dégradation des acides nucléiques, en particulier les ARN. Les rendements des acides nucléiques sont également impactés.

Pour le vortex, le temps de broyage est long, allant jusqu’à plusieurs dizaines de minutes. Ce type de broyage est plus doux et est conseillé si les ADN génomiques doivent rester intacts après la purification.
Dans tous les cas, il est recommandé de tester plusieurs vitesses et temps de broyage.
ANALYSER VOS RESULTATS APRÈS LA LYSE ET LA PURIFICATION DES ACIDES NUCLÉIQUES
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Afin de vérifier que les conditions de lyse et de purification sont optimales, il est important d’estimer le rendement et d’analyser la qualité obtenue.

1 - Le rendement :
Nous recommandons de mesurer la quantité des acides nucléiques par un spectrophotomètre comme le NanoDrop™.
Il est à noter que le spectrophotomètre mesure les absorbances des acides nucléiques qu’ils soient dégradés ou non. Par ailleurs, le spectrophotomètre ne peut pas différencier entre les ADN et les ARN. La quantité obtenue par cette méthode est souvent plus élevée que la quantité réelle.

Le spectrofluoromètre est une méthode plus spécifique permettant la quantification différentielle des ADN et des ARN. Mais elle ne permet pas de connaître la pureté d’une solution en acides nucléiques contrairement à la spectrophotométrie grâce aux ratios A260 nm/A280 nm et A260 nm/A230 nm. Pour connaître les ratios acceptables, lire ce TechOzyme. Ni le spectrophotomètre, ni le spectrofluoromètre ne permettent de vérifier la qualité des acides nucléiques, il est donc important de faire systématiquement un gel d’électrophorèse.

2 - La qualité
La qualité des ADN ou des ARN après la purification peuvent être analysées sur gels d’électrophorèse. Comme les molécules sont séparées en fonction de leur poids apparent, on obtient des profils de migration différents selon les caractéristiques des ADN génomiques, des ARN ribosomiques, des oligonucléotides... L’intégrité des acides nucléiques est donc analysée. Cette vérification est d’autant plus importante lorsque le broyage est fait avec des billes. Elle permet de vérifier si les conditions de broyage sont optimales vis-à-vis de la dégradation et de la fragmentation des acides nucléiques.
LE SAVIEZ-VOUS ?
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1 - Plus n’est pas toujours mieux
Une absorbance à 260 nm plus élevée n’indique pas forcément un meilleur rendement en ADN génomique. Les ADN ou ARN dégradés absorbent également à A260nm. Il est important de compléter la mesure par un gel d’électrophorèse.

2 - Le broyage à billes ne permet pas toujours d’augmenter le rendement.
Le broyage à billes n’est pas nécessaire pour tous les échantillons car il peut fragmenter, voire dégrader davantage l’ADN génomique. Le rendement en ADN génomique peut être moins élevé.